Achille Haguenier sait "Allumer le feu"
Il est l'homme qui a mis le feu à La Trinité plusieurs années de suite, celui qui a constitué tout un arsenal de fusils, poudre et munitions pour le Lion d'Azur. Et aussi celui qui a fait tirer au canon sur des soldats américains au château de Rochambeau... Dans notre série estivale consacrée aux souvenirs des anciens du Lion d'Azur, avant la soirée nostalgie du 5 septembre au château, rencontre avec Achille Haguenier.
Évoquant ses souvenirs vieux de plus de 30 ans, Achille Haguenier a le sourire de Noël Roquevert, tirant son feu d'artifice en Normandie aux côtés de Gabin et Belmondo dans Un singe en hiver. « Je travaillais comme chauffeur pour la voirie de Vendôme lorsque des camarades m'ont proposé de les rejoindre au Lion d'Azur pour m'occuper des accessoires. En 1986, pour le spectacle, ils avaient besoin de quelqu'un pour embraser la Trinité. C'est un gars de l'entreprise Ruggieri qui m'a expliqué comment m'y prendre la toute première fois. J'ai installé des feux de Bengale d'une durée de 5 minutes en bas, de 10 minutes à l'étage et de 15 minutes en haut. Effets garantis... On avait l'impression que ça flambait vraiment ! »
Devant un tel succès, le Lion d'Azur décide de lui confier l'ensemble des effets spéciaux du spectacle de Rochambeau. « J'étais chasseur depuis l'âge de 18 ans, j'aimais la poudre et je faisais moi-même mes cartouches. Pour Rochambeau, j'ai transformé des fusils russes en fusils impériaux. Les figurants s'en donnaient à cœur joie et tiraient entre 100 et 150 cartouches par soirée. Je leur disais parfois de se calmer un peu, après tout, c'était moi qui devais les fabriquer. »
Puis, intarissable, il continue d'évoquer ses souvenirs : « Pour les tirs de canon, j'avais fabriqué un mannequin en quatre parties. Lorsqu'on lui tirait dessus, les parties se séparaient et pouvaient resservir ensuite. » Achille Haguenier se remémore dix années formidables, pleines de défis : « Ils avaient de drôles d'idées et me demandaient parfois de drôles de choses, mais je finissais toujours par trouver une solution. » Il se souviendra également des deux spectacles de Chambord, avec quatre compagnons qui aménagèrent avec lui le bateau sur lequel il devait, le soir venu, tirer au canon quatre fois de suite. Mais si Achille répugnait à sortir des décors dans lesquels il travaillait, il accepta cependant, une fois, une seule, d'apparaître en costume d'époque, pour le défilé des États Généraux qui eu lieu à Versailles lors des cérémonies du Bicentenaire de la Révolution française. Une prestation remarquée par la reine Marie-Antoinette elle-même, qui aimait sans doute l'odeur de la poudre...
Une fois terminée l'aventure du Lion d'Azur, Achille Haguenier, qui avait gagné ses galons d'artificier, continua durant les dix années qui suivirent d'embraser... le plan d'eau de Villiers, chaque 14 juillet.
Pascal Blondiaux, pour La Nouvelle République
Photo fournie par Achille Haguenier.